L’interview des fondateurs de Ninja Tune

L’interview a été réalisé par Barney pour le Weshgrosclub blog.
Merci a Matt et Jonathan pour leurs réponses ! Un grand merci a la Ping Pong team en particulier Aurélien pour la traduction !!!

Interview de Matt Black

Très heureux de fêter cet évènement a vos côtés, les 20 ans de votre label Ninja Tune. Il est peut être utile de rappeler la raison d’être de Ninja Tune, le pourquoi du terme Ninja.

Nous avons créé Ninja car cela représentait une porte de sortie à la sale situation dans laquelle nous étions enfermés en appartenant à une major. Nous voulions sortir des sons plus expérimentaux, créer une nouvelle identité. L’idée est venue d’un voyage au Japon, plus précisément en regardant une émission et en lisant un article au sujet des ninjas. Nous y avons vu un symbole fort, un grand concept. Rester dans l’ombre, avoir une approche moins frontale pour créer de la musique et envisager l’activité de DJ.

Vous étiez vraiment pieds et mains liés à l’époque avec cette major après les hits de Yazz ou Lisa Stanfield ?

Oui c’était vraiment difficile. Nous ne comprenions pas toutes les implications de notre contrat avec BMG. Il s’agissait d’un problème de contrôle. Le label a été racheté par une major encore plus grosse. Les gens à l’intérieur de ces maisons de disque n’étaient plus les mêmes et le dialogue, la compréhension entre nous en ont pâti.

Vous vous attendiez à une telle longévité ? Depuis le Bogus Order ‘Zen Brakes 1’ et le DJ Food ‘Jazz Brakes 1’ que de chemin parcouru !

Nous avons eu beaucoup de chance, et ce dans beaucoup de domaines en fait… Nous avons bien joué le coup ! J’espère être encore là dans 20 ans. Nous sommes animés par assez de passion pour ce que nous faisons pour y arriver ! C’est grâce à cette intégrité que les gens nous reconnaissent.

Quelles sont vos influences musicales qui ont forgé le son de Ninja Tune ?

En un mot : le hip hop. Il y a beaucoup d’autres influences mais le hip hop a réellement fasciné tous les groupes du label. Son influence fut juste immense ! C’est une culture forte qui nous relie : pas seulement le deejaying mais aussi le mcing, la danse ou encore le graph… des racines musicales très fortes. Ninja Tune est un label de DJ, peut être plus que d’autres labels (grâce à Food, Scruff, Kid Koala…Etc). Sinon la black music en général est aussi très importante dans notre identité. James Brown est une telle source d’inspiration… Enfin n’oublions pas le funk, le jazz et la soul.

Quel fut pour vous le détonateur du label, le premier ‘grand classique’ estampillé Ninja ?

« The Band Played The Boogie » fut le 1er track du catalogue Ninja avec du chant. Une version rap d’un track de DJ FOOD. Un morceau important dans notre histoire ! Sinon je citerais aussi « it’s a long road » par FUNKI PORCINI. Une étape importante pour Ninja. La période post-rave, ambient des 90s. Ce morceau nous emmène à d’autres niveaux de psychédélisme…

Sur ces 20 ans, quel regard porter vous sur le catalogue impressionnant de Ninja Tune et ses sous labels comme Ntone, Counter et Big Dada…

Je les aime oui. Nous pouvons être pleinement satisfaits lorsque nous regardons en arrière. Ninja Tune se sent fort.

Votre plus grande fierté pour le label ?

Je pense que c’est d’être toujours en vie ! De pouvoir célébrer ces 20 ans. Toutes les fois ou nous avons pensé abandonner, où nous étions sur le fil du rasoir, nous nous sommes toujours redressé. Je suis aussi fier du fait que beaucoup de gens nous citent comme une source d’inspiration, que ce soit des artistes, des musiciens ou même des labels.

Avec une industrie du disque plutôt morose, tenir un label relève du défit ?

Oui pour toutes les raisons que j’ai évoquées. Les entreprises les plus puissantes ont tendance à tout manipuler, nous avons toujours fait en sorte d’éviter les pièges du système capitaliste. Evidemment les règles du jeu ont connu de profonds bouleversements, notamment au cours des 10 dernières années… Mais nous nous sommes adaptés ! L’intelligence réside dans la capacité de s’adapter à de nouveaux environnements. C’est un grand challenge.

En 20 ans, le son ‘Ninja Tune’ a forcément évolué. De DJ Food à Grasscut c’est un peu le grand écart ? Il semble y avoir une sensibilité pop beaucoup plus marquée par la présence de projets vocaux, vous êtes d’accord avec cette analyse ?

En fait j’adore les tracks qui contiennent des parties chantées. Se concentrer sur les parties instrumentales est plus simple et d’une certaine manière le défi ultime est d’être un chanteur, d’avoir la capacité à communiquer avec le public. Concernant la « sensibilité pop » je pense qu’il y a du vrai. Nous avons constaté à quel point notre public apprécie aussi cet aspect « chanté » dans notre catalogue.

Interview de Jonathan More

La plus forte vente du label ? Mr Scruff ? Bonobo ?

Alors, dans l’ordre : 1- Cinematic Orchestra / 2- Amon Tobin / 3- Bonobo

Parmi mes préférés du label, il y a ‘Dark lady’ de DJ Food, le Ryuchi Sakamoto ‘Payer’, ‘All That You Give’ de Cinematic Orchestra ou encore Bonobo ‘Nightlite’. Mais si il y a un titre dont je ne me lasse pas c’est ‘The Great Drive By’ de Funki Porcini le remix de Bent est hallucinant ! Et son nouvel Lp ‘On’ ne quitte plus mes platines. Vous connaissez son secret à James Bradell ?

James est quelqu’un de brillant, drôle, ouvert, funky et fait preuve d’un esprit curieux, tout en ayant une grande expérience de la vie… Tout cela se reflète dans la musique qu’il créer.

Parlons des festivités de septembre à Paris. Beaucoup d’artistes du label seront en live ou en Dj set notamment au Centre Pompidou, grand lieu de l’art contemporain parisien. Il semble exister une filiation entre Ninja Tune et l’Art en général. Le design et les logos du label, les pochettes de disques sont soignées. C’est important pour vous ?

Oui cela a toujours été important pour Matt et moi, mes années à l’école d’art et la grande lignée d’artistes et designers présents dans la famille de Matt sont nos influences les plus précoces. Nous avons créé des liens entre ça et notre amour pour la musique et les labels obscurs. Stiff records, Def Jam, Tommy Boy, Rough Trade, Factory, Island, Trojan…etc ont tous ou ont tous eu des artworks magnifiques et une identité visuelle très affirmée. Strickly Kev, notre génie du graphisme, constitue le ciment entre toutes les personnalités diverses qui constituent le label et sait comment révéler leur individualité au sein de l’identité Ninja.

Pour les 10 ans, il y avait eu le quadruple vinyles Xen Cuts et pour les 20 ans il va y avoir un coffret collector, vous pouvez nous en dire plus ?

-2 x CDs of new tracks from Ninja Tune artists
-2 x CDs of new exclusive remixes (at least one of these CDs will be exclusive to the box set)
-4 x 7″ single – 3 x 7″ of exclusive dubs/mixes of Ninja tracks (exclusive to the box set) by Ninja artists; Coldcut, Roots Manuva, Bug, Scruff, King Cannibal – 1 x 7″ double grooves of material exclusive to the box set
-1 x 192 page book entitled ‘NINJA TUNE: 20 Years of Beat & Pieces’

Plus:
– Ninja Tune family tree poster
– Ninja catalogue poster of all album covers
– Ninja Tune XX sticker sheet

Luxuriant n’est-ce pas ?

Vos espoirs pour Ninja Tune ? Des nouvelles signatures en vue ?

Si nous pouvions réduire de façon drastique notre empreinte carbone, tout en faisant la fête encore plus… et toujours ressentir la sensation vertueuse d’être debout alors que les autres rampent.

Une dernière question, qu’écouter vous en ce moment (hors artistes Ninja Tune) ?

Aujourd’hui j’ai surtout écouté :
-Chairman of the Board-Hanging on to a Memory
-Tricky-Overcome
-Mary Jane Girls-All Night Long
-Roy Ayers and Ubiquity – We Live In Brooklyn, Baby
-Detroit Experiment-Highest
-Kenny Larkin-Azimuth
-Martyn-Elden St.
-Milanese-Barry Dub
-Gary Bartz Ntu Troop-Celestial Blues
-Kenny Larkin-Tedra
-Yasuko Agawa-L.A. Night [12′ Version]
-Aardvarck-Start-Rush Hour
-Joseíto Fernández-Guantanamera
-Joker Untitled rsn
-Culture-Jah see them cum
-le nouveau Flying Lotus
-Radio 4

Aujourd’hui j’ai bien évité d’écouter :
-Un raciste
-La circulation
-Les disputes
-Le foot
-Les oiseaux de mauvais augure
-Big brother

Barney

De sa Normandie natale, Barney taquine les platines depuis une quinzaine d’années. Il a pris de plein fouet l’avènement de la techno et de la house dès la fin des 80’s. Influencé par tous les grands protagonistes du genre (Derrick May, Kevin Saunderson, UR, MAW...), il se prend un claque à l’écoute de Radio Nova à la grande époque des Novamix ! Il jubile sur les sons de Laurent Garnier, Loïc Dury, Gilb’r, Dimitri From Paris, Dee Nasty, Lord Zelko, Volta... Mais c’est Gilles Peterson et son ‘Worldwide’ qui va faire effet de détonateur sur le DJ normand dans la façon de penser ses sets, façon ‘selecter’. Pouvoir mixer de la deep-house avec un classique rare-groove, de la drum&bass ou enchaîner sur du jazz abstrait... Liberté d’action, mais aussi le besoin de faire découvrir tous ces sons. Côtoyant les producteurs Wax Tailor et Laurent Collat (de Vernon comme Barney), il continu d’engranger du vinyles... Après avoir chroniqués des disques pour Only for DJs pendant 10 ans et diverses ’résidences’ de DJ Selector sur Evreux ou Vernon, Barney est aujourd’hui résident au Shari-Vari (Bar-Concert situé à Rouen) pour les session ELECTRO LIBRE. Une déclinaison est en préparation au Point-Bar de Vernon.

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