Paolo Fresu nous présente son double album « Songlines » / « Night & Blue » sur son propore label Tük Music
Sommaire
Dans le monde du Jazz, on connaît et on aime depuis longtemps le trompettiste Sarde Paolo Frèsu comme le plus émouvant de Miles Davis et Chet Baker de sa génération. On lui pardonne souvent, à cause de ces moments de grâce qu’on le sait seul capable de provoquer, ses bizarreries Rock avec son Angel ou son dernier Devil Quartet, ethniques avec PAF, et à la scène sa propension à utiliser trop souvent le sampler et d’effets électroniques un peu gadgets au lieu de la trompette ou du bugle dont il joue si bien.
Paolo Fresu Quintet Live in Mortara 2010
Paolo Frèsu a monté son propre label « Tük Music », et pour fêter ça il nous livre peut-être son meilleur disque depuis longtemps, où se rejoignent toutes les raisons pour lesquelles on l’a toujours aimé, et avec raison, sans aucune faute de goût, cette fois-ci.
Il a pour ce faire réuni son 5tet italien (celui de « Night On The City », son moins aventureux et plus « Jazz »), pour proposer leurs propres compositions originales sur un premier CD, comme sur « Kosmopolites » mais avec un répertoire intégralement sublime, et des reprises de standards et de compositions des grands du Jazz sur le second.
(…) De loin, ce « Songlines » est son plus beau disque depuis « Night On the City », ou peut-être depuis toujours (…)
Le premier, « Songlines », présente en effet des thèmes tous sublimes d’un bout à l’autre, des ballades acoustiques (Eterninna) lui donnant l’occasion de montrer son à-propos à la Miles puis cette émotion de tous les instants à la Chet Baker sur des tempos lents à fondre sur place ou doucement latins, adossées au silence, comme en apesanteur, BO idéale de nos plus sincères émotions musicales recommandé pour un cocooning hivernal.
Mais Paolo Frèsu aime aussi les surprises, et pour ce coup-ci elles sont heureuses. Alors qu’on commence à peine à ronronner et presque ronfler arrive « The Right Way », un tempo plus vif à la Miles dans «Autumn Leaves », et le moelleux du fender rhodes pas trop Jazz Rock, plutôt en apesanteur sur les nuages. On poursuit dans le genre Miles modal du dernier quintette avec « Lirico », accélère un brin « Wayne » (Shorter ? le saxophoniste du groupe de Miles à l’époque).
Et alors qu’on le croit part sur cette lancée, seconde surprise électrisante avec « Nucleo » (qui nous rappelle la citation du clinamen de Lucrèce dans « Angel »), électrique, mais au groove léger cette fois, entre Herbie Hancock voire même Tribe, où on ne l’attendait pas. A entendre ce nouveau répertoire, on se rend compte que chez lui comme chez le Miles électrique, le Jazz Rock trop violent est souvent l’ennemi du lyrisme simple des ballades acoustiques, mais qu’ici il a su concilier le côté cotonneux du rhodes avec cette chaleur dans les mélodies, les unissons, la quintessence philosophique de ces deux qualités, la formule parfaite, ave ces réminiscences légères comme d’ « African Lady » dans « Blue Water, et vous laisse en orbite swinguer à l’unisson des anneaux de « Saturn » sur les tempos hard bop du dernier quintette de Miles sans la moindre envie d’en redescendre.
De loin, ce « Songlines » est son plus beau disque depuis « Night On the City », ou peut-être depuis toujours, sans le moindre tempo trop rapide, juste un rêve éveillé qui vous porte et qu’on a envie de réécouter pour s’imaginer d’autres histoires sans paroles sur ces histoires sans paroles.
Et ce n’est pas tout, puisque c’est un double CD :
Le second CD, « Night & Blue », plus Jazz classdique, est consacré aux reprises de standards et des grands trompettistes de Jazz, favorisant le 5tet comme interprètes du répertoire. Fresu s’montre d’emblée sublime sur « Blue Gardénia » à la Chet Baker, ralentissant le tempo avec l’émotion. Miles est présent aussi avec son « Blue In Green » (composé avec Bill Evans pour l’album « Kind Of Blue »), « Blue Seven » de Sonny Rollins pour le Blues, « Blue Samba » pour le soleil , « Moonlight In Vermont », « Summer Night », « Nightlake » puis « Night Flower » et « Children Of The Night » pour la nuit, « Blue Silver » de (Blue) Mithell, et Peace d’(Horace) Silver et Blue Gardénia encore en final.
Avouez que rien que les titres sur le papier, c’est beau comme un (ou plusieurs) poème(s) et les interprétations sont à la hauteur des attentes de nos émotions nostalgiques, dans le plus pur esprit West Coast et romantiques à souhait!
Et si c’étaient les labels de Jazz qui faisaient que Paolo Fresu n’ait jamais été aussi bon ?
Pas possible! Au moins a-t-il maintenant toute liberté maintenant de réitérer l’exploit!
Alors pour vous et pour lui, jetez-vous sur ce disque!
Commentaires récents