Live Report : Les Shaolin Temple Defenders En Concert à La Laiterie Strasbourg
Le jeudi 2 décembre dernier, les Shaolin Temple Defenders, groupe Funk/Soul de Bordeaux se produisaient au Club de La Laiterie. Depuis 2003, le chanteur The Lion Of Bordeaux se produit accompagné de Mickey Fourcade (batterie), Jérémy Ortal (basse), Pierre Petit dit « Le Prêtre » (guitare), Cédric Lazare (orgue), Laure Fréjacques (trompette) et Vincent Le Fort (saxophones), et ils ont sorti « Chapter One : Enter The Temple », « Chapter Two : Gettin’The Spirit », et cette année « Take it Slow » et chanté avec Martha High (choriste de James Brown) : c’est dire que pour ces Défendeurs du Temple de la Soul, c’est une religion, une spiritualité, une raison de vivre.
Shaolin Temple Defenders – Take It Slow (Live at RamDam Dans Les Bureaux) 2010
Et dès l’entrée sur scène, les cuivres funkys rappellent ceux des JBs ou du label Stax qui accompagnaient Otis Redding ou Sam & Dave, mais ne se contentent pas de copier, passent très vite d’un riff à l’autre sans discontinuer en une sorte de zapping-medley instrumental introductif comme James Brown dans « Live At The Apollo » en 1962 ou plus tard « In The jungle Groove », passant d’un titre à l’autre sans pause sur un tempo d’enfer avec les variations rythmiques et thématiques comme seuls repères. On comprend déjà à quel point ils ont assimilé les riffs de la Stax, de la Motown et des JB’s comme des Jazzmen leurs standards, jusqu’à en faire leur propre langage et pouvoir ainsi s’y déplacer librement. Et du coup on n’a pas le temps de s’ennuyer du déjà entendu.
Arrive le chanteur «The Lion Of Bordeaux » annoncé sur les cuivres par Le Prêtre tel James Brown à l’Apollo, encore chanteur de Soul Music avant le Funk et « Sex Machine » en 1962 dans le premier Live de l’histoire du Rythm’N’Blues, tel l’empereur romain noir d’un péplum Blaxploitation plus festif. On comprend aussi très vite pourquoi on l’appelle THE LION (Le LION) of Bordeaux, car il crie, rugit « screaeaeame » dans l’aigu comme James Brown lui-même, avec cette animalité sauvage, dès « Step To It », et l’orchestre applique la méthode imparable des riffs rythmiques derrière lui à ses « Hit Me » et faisant hurler « Yeah » en chœur et en harmoniques au public.
C’est sûr qu’à côté Ben L’Oncle Soul en nœud papillon, bretelles et chapeau années 20-50s est bien gentil mais un peu emprunté, la version commerciale qui arrive déjà hors du coup pour consoler la nostalgie, lancé comme un paquet de lessive décolorante à la naphtaline qui lave les émotions plus blanc que blanc pour Lavomatiques, alors qu’eux font VIVRE cette musique, lui redonnent couleur et énergie ICI ET MAINTENANT!
On effet, les Shaolin Temple Defenders ne sont pas un groupe de reprises, mais de compositions originales à la manière des grands de la Soul, et ne s’en tiennent pas qu’à son idiome Afro-Américain, mais en appellent à l’ « International Soul » présente dans les Âmes humaines de l’Europe aux Caraïbes, collent les riffs d’ « In The Midnight Hour » de Wilson Pickett, sur des vocaux à la « I Got The Feeling » de James Brown des classiques de la Soul, souvent si rapides qu’on n’a le temps que de se dire « ça je connais ! ».
Ils ont compris l’essence de la Soul, jusque dans leur dernier «I Know What It Is Love LOVE » épelé en chœur par le public, une musique d’Amour Universel qui parle au cœur et à l’Âme, consolatrice et engagée sans violence, qui a pu porter jusqu’à son terme le combat des Droits Civiques Noirs.
Quand il se fait plus fragile, The Lion Of Bordeaux peut aussi faire penser à la Janis Joplin entourée des cuivres qui ne l’auraient pas quittée si elle était née noire de « Got Dem Ole Kozmic Blues, Mama » dans « As Good as You’ve Been To This World », message qu’il serait temps de remettre à l’ordre du jour («Le monde sera aussi bon pour toi que tu l’auras été avec lui »).
Et sur les tempos rapides, on en est presque à l’époustouflant « Night Train » de James Brown & The Flamous Flames à l’Apollo.
Les cuivres et tous les autres instruments tiennent chacun leur rôle à la perfection : trompette rutilante, saxophoniste imitant dans ses montées le solo historique de Macéo Parker dans « You Can Have Watergate But Gimme Some Bucks and I’ll Be Straight » des JB’S repris par De La Soul (« Ring Ring Ring ») et tant d’autres, organiste entre le groove du Swinging London et parfois l’émotion du Gospel en introduction, le batteur assurant à souhait le soutien rythmique et le breakbeat du « funky drummer » (toujours James In The Jungle Groove) sans en abuser comme celui des Bamboos qui en comparaison semblent bien fades, la guitare du Prêtre rajoutant un côté Rock et la basse bien décalée aussi bons en rythmique qu’en solos, donnant à « Starting Anew » un côté « New Ways Train Train » de Jeff Beck.
(…) c’est le plus authentique concert de Soul Music auquel j’aie jamais assisté (…)
Dans la ballade « Back On My Memories », on pense à l’une des reprises les plus émouvantes du grand Otis Redding, « Try A Little Tenderness« , dépassant toutes les versions de Frank Sinatra en accélérant le tempo du désespoir à la joie délirante dans le final, avec une belle progression des cuivres du fond sonore enveloppant en contre chant aux riffs puissants.
Et pour le côté Hip Hop (ils font « quand même partie de l’an 2000 », du XXIème siècle), ils ont enregistré le titre éponyme de leur dernier album « Take it Slow » avec Gift of Gab des Blackalicious, mais leur Hip Hop est Soulful, un peu Baba Cool à la Arrested Development, n’appelle qu’à la paix et n’occupe qu’un titre sur le disque ou dans leurs concerts, et entouré de cuivres et de chœurs qui font du rapping UN ELEMENT parmi d’autres, pas la première place, porté plus qu’imposé.
En Bis, les cuivres introduisirent The Lion Of Bordeaux des riffs Stax de « Soul Man » de Sam & Dave, et l’organiste révèla un talent à la flûte Jazzy Khrishnatique progressive Baba Cool à la « Sweet Smoke », tandis que le Lion prêchait à la James Brown « We Gonna Loose What We Have To Get What We Want ! ».
En un mot, tant quant au chant (du Lion, et aux chœurs sur le disque) que quant aux arrangements, c’est le plus authentique concert de Soul Music auquel j’aie jamais assisté !
Évidemment James Brown c’est aussi le Funk et Sex Machine mais c’est plus facile à refaire que l’âme de la Soul et l’Apollo.
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